Transmettre le vocabulaire en géographie : identifier et expliciter les essentiels

L'un des principaux constats en fin de cycle 4 est que les élèves ne maîtrisent pas suffisamment le vocabulaire de la géographie. Qu'il s'agisse de justifier une réponse ou de rédiger un développement construit, le manque de vocabulaire pénalise les élèves, non seulement pour la rédaction, mais aussi dans la construction de leur pensée.

Parfois, ce vocabulaire spécifique semble "évident" alors même qu'il n'est pas acquis par les élèves (par exemple, le terme d'infrastructure est souvent présenté aux élèves comme allant de soi, sans pour autant avoir été préalablement défini). Souvent, ce vocabulaire a été défini, expliqué et explicité aux élèves lors de niveaux précédents, mais peu réactivé pendant les mois, voire les années, suivant cet apprentissage, et n'est, de ce fait, pas aussi consolidé dans l'esprit des élèves qu'il ne le paraît (par exemple, le terme de métropole est défini en classe de 6e, puis remobilisé en classe de 4e, mais, dans ce laps de temps, il est laissé "de côté" dans le programme de géographie). À l'inverse, un vocabulaire qui relève davantage du lexique est parfois très valorisé par la répétition, de séquence en séquence, sans faire nécessairement partie des fondamentaux essentiels au raisonnement géographique.

Ainsi, pour consolider le vocabulaire de la géographie, nécessaire pour justifier, argumenter, analyser, il est indispensable d'être au clair sur les essentiels et de prévoir une réactivation régulière, par-delà les seuls impératifs de telle ou telle séquence. Il s'agit donc de concevoir un livret des essentiels de la géographie, à partir de plusieurs étapes :

• repérer le vocabulaire essentiel de la géographie, c'est-à-dire le vocabulaire qui ne relève pas du lexique, mais des éléments explicatifs en géographie ;
• identifier les parties du programme (dans le temps long, et pas seulement sur un niveau) où ce vocabulaire est directement mobilisé ;
• insérer ce vocabulaire dans l'ensemble de sa programmation en prévoyant de leur faire émerger de manière répétitive, pour favoriser la compréhension mais aussi l'acquisition de ces termes dans le long terme.

Ce travail sera d'autant plus efficace s'il est mené en équipe, et plus encore (bien que ce soit souvent complexe dans la mise en oeuvre) en équipe inter-degrés.

Sans prétendre au modèle, voici un tableau des essentiels de la géographie tels qu'ils apparaissent dans le programme de géographie en cycles 3 et 4, qui peut servir de base de réflexion individuelle et/ou collective. Cette liste ne fait pas référence aux notions que doivent obligatoirement acquérir les élèves pour chaque chapitre, mais à celles qui sont le "bagage" de l'enseignant, dans le sens où ces notions sont en train de se construire (cycle 3) ou sont en train d'être définies (cycle 4). Ce tableau des essentiels permet de visualiser en quoi les activités menées en cycle 3 permettent d'amorcer l'explicitation de notions plus complexes en cycle 4.

À cette liste d'essentiels, s'ajoutent les éléments fondateurs de la réflexion géographique, qui parcourent l'ensemble des thématiques :

• l'inégale répartition,
• le raisonnement multiscalaire,
• le rôle des acteurs.

Les essentiels ici relèvent des items d'essentiels. Ainsi, le site Sciences cognitives distingue trois types d'essentiels : les items essentiels, les items supports de savoir-faire, et les items contextuels (source : "Le répertoire des essentiels", Sciences cognitives). La liste ne reprend pas les items contextuels, dont la mémorisation sur le temps long n'est pas nécessaire. Cette distinction préalable à la conception du cours paraît nécessaire, pour éviter de "noyer" les élèves dans du vocabulaire contextuel (c'est-à-dire utile pour comprendre un phénomène très précis, mais dont l'usage est circonscrit à ce phénomène) et pour leur faciliter la hiérarchisation dans la mémorisation.

Pour donner un exemple concret, on choisit par exemple ici de ne pas faire apparaître le terme "écoquartier" dans les items essentiels alors qu'il apparaît dans plusieurs parties du programme en cycle 3 (en CM2 dans le thème 3, et en 6e dans le thème 1). L'écoquartier est conçu (il s'agit d'un choix personnel) comme du vocabulaire (item contextuel), et non comme une notion essentielle (item essentiel), puisqu'il s'agit de faire comprendre aux élèves que, dans des contextes de territoires riches (item essentiel) des aménagements (item essentiel) sont mis en place par des acteurs (item essentiel) pour réduire les inégalités sociospatiales (item essentiel) selon les principes du développement durable (item essentiel), avec plus ou moins de réussites. Dans cet exemple, le terme "écoquartier" permet l'illustration et la description, mais ne permet pas la compréhension fine d'autres phénomènes, contrairement aux items essentiels.

Cette liste des essentiels, qui est perfectible et personnelle, permet à l'enseignant de : 

• se repérer dans le programme, et surtout dans la progressivité des notions à acquérir par les élèves, c'est-dire éviter de percevoir une notion comme déjà vue (voire acquise) par les élèves et créer des implicites qui limiteront la compréhension des élèves ;
• replacer des éléments "clins d'oeil" lors de l'accroche des différents chapitres, qui permettent aux élèves de se repérer eux-mêmes par rapport aux savoirs précédents ;
• repérer les éléments saillants à définir en équipe pour une plus grande explicitation des notions d'une année à l'autre.

Une fois cette liste établie, elle sert pour faire les fiches de mémorisation et les encarts de mémorisation, qui constitueront les outils pour favoriser la mémorisation des connaissances. De plus, elle permet de mettre à disposition des élèves une fiche vocabulaire des essentiels, à l'échelle d'une année scolaire, mais aussi à l'échelle d'un cycle.