Les temps d'une séance : de l'outil de formation à la pratique en classe

Un outil de formation : les temps sensibles de la séance

Si elles s'adressent d'abord à celles et ceux qui conçoivent des formations, les ressources proposées par le Centre Alain Savary de l'Institut français de l'éducation (Ifé) sont aussi utiles pour les enseignants qui réfléchissent à la forme scolaire.

Dans le dossier "Enseigner plus explicitement" (2016), le Centre Alain Savary propose ainsi de réfléchir aux temps d'une séance, pour en identifier les "temps sensibles" ("Enseigner plus explicitement, un outil pour la formation ?", Institut français de l'éducation, 13 janvier 2016).

Si le découpage d'une séquence en séances aux objectifs bien définis est au coeur de la construction de toute séquence, les temps de la séance eux-mêmes doivent être pensés. Marc Prouchet propose ainsi un modèle sous la forme d'un double entonnoir afin d'identifier les temps sensibles de la séance.

Deux temps sensibles de la séance sont bien connus des enseignants, et bien appropriés par la mise en place de rituels qui visent à théâtraliser ces moments tout autant qu'à rendre explicites les objectifs et les apprentissages-clefs de la séance : l'entrée et la sortie de séance.

Les rituels dans et hors la classe : un mur de ressources

L'entrée en tâche et la sortie de séance : propositions de rituels par l'Ifé

Source : "Enseigner plus explicitement, un outil pour la formation ?", Institut français de l'éducation, 13 janvier 2016.

Si le modèle proposé ne tend pas à dire que toute séance doit être structurée de la sorte (cela dépend fortement des enjeux et de l'activité mise en place), il paraît intéressant d'utiliser cet outil pour réfléchir aux temps sensibles de la séance, c'est-à-dire aux moments où des malentendus cognitifs peuvent apparaître pour certains élèves :

pendant l'entrée de séance :
- les prérequis ne sont pas acquis par certains élèves,
- confusion entre buts et enjeux.
au lancement de la tâche :
- confusion entre moyens et enjeux,
- des savoir-faire ne sont pas acquis par certains élèves.
pendant la tâche :
- des élèves sont dans le "faire pour le faire",
- des élèves sont démotivés face à la tâche,
- des élèves bloquent sur un point précis et ne peuvent plus avancer,
- des élèves manquent d'autonomie face à la tâche (parfois par difficulté face à la tâche, parfois par peur de "mal faire" ce qui les poussent à solliciter l'approbation pour toute micro-tâche),
- le rythme de réalisation de la tâche est très variable en fonction des élèves.
pendant le temps de bilan / reprise collectif :
- des élèves sont peu attentifs,
- ce temps est souvent très restreint, contraint par le format de la séance,
- certains élèves n'osent pas participer à ce temps qui leur sert peu.
pendant la sortie de séance :
- le temps manque très souvent, et cette sortie de séance est souvent restreint à son minimum,
- certains élèves ont des difficultés à décontextualiser, confondant l'étude de cas (l'activité) et la connaissance à acquérir.

Marc Prouchet prône un retour en tâche après l'état des lieux collectif. On y retrouve globalement les mêmes difficultés que lors la première mise en tâche. Force est de constater qu'il est difficile à mettre en oeuvre sur les séances de 55 minutes, mais il est une piste très intéressante pour d'autres formats (tout particulièrement pour le premier degré ou pour les établissements qui pratiquent les séances d'1h30, pour lesquelles il convient fortement de ne pas faire en 1h30 ce qui se faisait en 1h, mais bien de repenser le découpage d'une séance).

Cet état des lieux ne se veut pas exhaustif, il vise à mettre en lumière les nombreux temps sensibles d'une séance pour les élèves, qui peuvent produire des malentendus cognitifs.

Quelles pratiques en classe ?

Après avoir identifié les temps sensibles d'une séance, Marc Prouchet propose des pistes pour une mise en pratique en classe, qui permettent notamment d'éviter l'impression de devoir "être partout" qu'ont les enseignants face aux sollicitations des élèves et d'apporter des remédiations appropriées aux élèves.

Temps sensibles d'une séance et pistes de remédiation

Source : Marc Prouchet, 2008, "Le double entonnoir ou... projecteurs sur moments sensibles de séance", cité dans : "Enseigner plus explicitement, un outil pour la formation ?", Institut français de l'éducation, 13 janvier 2016.

S'il ne s'agit pas ici de présenter ces pistes comme des "absolus", elles permettent de réfléchir aux dispositifs qui peuvent être mis en place, par chacune et chacun, dans sa classe, face à ses élèves.

Parmi les possibles, la table d'appui (au sens d'Alexia Forget, un dispositif où l'enseignant regroupe des élèves temporairement parce qu'ils ont le même besoin d'explicitation à un moment donné) et la table d'aide (un dispositif davantage matériel où les élèves disposent, en autonomie, d'outils d'étayage tels que des fiches méthodes, des fiches de vocabulaire illustré, des fiches d'étayage sur l'activité en cours, des boîtes à vocabulaire, un mémo des consignes, des fiches-ardoises pour mettre en oeuvre les méthodes sous la forme de brouillon, etc.) sont deux dispositifs très efficaces pour les temps de l'activité, permettant aux élèves de disposer d'un étayage approprié, d'avoir une remédiation immédiate (table d'appui) d'être davantage autonomes dans la réalisation de l'activité (table d'aide) et ainsi voir leur engagement renforcé dans l'activité.