Une affiche sur les types d'évolution

J'ai une grande difficulté à faire retenir à mes élèves que la réponse à une question de type "quelle est l'évolution" ou "comment évolue" ne peut pas être "ça évolue"... De fiches-méthodes en fiches-méthodes dans les cahiers, de corrections d'exercices en corrections d'exercices, inlassablement je fais le même constat : une grande partie des élèves sait bien appliquer la "méthode" (si on peut appeler ainsi le fait de retenir les trois types d'évolution : augmentation, stagnation/stabilisation, diminution, puis de les caractériser ensuite par des adjectifs rapide/lente, forte/faible) quand on vient de la (re)voir, mais l'oublie instantanément et peine à la transférer dans d'autres séquences.

Par exemple, en classe de 5e, après un long moment sur l'étude de graphiques en géographie et sur l'étude de l'évolution de la population à plusieurs échelles (donc avec de nombreux graphiques que nous étudions ensemble), les élèves peinent, dans la séquence suivante, à ne pas spontanément répondre "ça évolue" pour des questions portant sur des cartes sur l'évolution territoriale des empires méditerranéens médiévaux. Pourtant, dans la salle, est toujours affichée la méthode "Lire un graphique en courbe" où sont indiqués les trois types d'évolution (augmentation, stagnation, diminution), et sur la fiche d'aide pour l'activité, les élèves ont une "astuce" les invitant à se référer à cette méthode dans le cahier. Inlassablement, une partie d'entre eux écrira "le territoire de l'empire xxx évolue entre le xxxe siècle et le xxxe siècle"...

Cela me paraît être un réel blocage, et malgré de nombreuses "astuces" en classe (par exemple, expliquer que ce serait comme répondre "Paul a de l'argent" en mathématiques si la question était "Paul a 10 billets de 20 €, 3 billets de 10 € et 5 pièces de 2 €. Combien Paul a-t-il d'argent ?"), beaucoup d'élèves continuent de répondre "ça évolue", ou plus précisément réussissent à répondre correctement si on focalise l'activité ou l'évaluation sur cet attendu, mais peinent à y répondre sans "filet de sécurité", sans "coup de pouce" sur cette question.

La question de cette absence de transfert d'une séquence à l'autre me paraît venir (peut-être à tort...) de deux principales raisons :

• une absence de méthode de travail pour certains élèves qui ont "bachoté" la méthode pour la séquence précédente sans réellement se l'approprier, malgré le fait de l'avoir répétée dans de nombreuses activités dans la même séquence (absence de méthode pour des apprentissages à long terme qui touche l'ensemble des apprentissages, et n'est ici que "révélée" au prisme d'un cas spécifique)  ;
• un cloisonnement, dans l'esprit des élèves, des "méthodes" dans une séquence, comme si dans leur imaginaire, malgré les multiples annonces faites en classe sur l'utilité transversale de telle méthode (d'une séquence à une autre, de l'histoire à la géographie et inversement, d'un niveau de classe à un autre, etc.), une méthode ne servait que dans une séquence, et qu'elle pouvait être "refermée" une fois la séquence terminée.

Pour pallier à ce deuxième aspect, l'affiche "Lire un graphique en courbes" dans la salle de classe, si elle évoque bien les différents types d'évolution et pourrait servir de repères aux élèves, tout au long de l'année (y compris en évaluation) est loin d'être suffisante, puisqu'elle enferme, là encore dans l'imaginaire des élèves, les types d'évolution à la seule lecture du graphique en courbe.

Afin d'y parvenir, voici une affiche se centrant sur les trois types d'évolution : elle est volontairement simple, car elle s'adresse d'abord aux collégiens en phase d'apprentissage de ce vocabulaire. De plus, elle s'appuie sur le constat qu'une fois réactivée l'idée de ne pas pouvoir répondre "ça évolue", mais de devoir caractériser l'évolution par une forme d'évolution (augmentation, stagnation/stabilisation, diminution), les élèves se remémorent volontiers qu'il faut, pour aller plus loin (et ce qui serait un attendu au lycée, par exemple), qualifier cette évolution (avec des adjectifs, notamment sur le rythme de cette évolution), voire la découper en plusieurs périodes (attendu du lycée, ou par questions guidant le raisonnement au collège).

L'affiche, simple donc, se donne pour objectif d'essayer de solliciter la mémoire visuelle pour ancrer dans l'esprit des élèves que l'on ne peut répondre "une évolution" à la question "quelle est l'évolution ?". En espérant voir moins de "ça évolue" au fil des activités cette année. Elle est accompagnée de la version "à compléter" pour les cahiers des élèves (le fait de leur faire dessiner les formes d'évolution vise à leur faire s'approprier cet outil).

Absolument rien de "révolutionnaire", en somme, dans ce partage, si ce n'est le partage d'un réel questionnement sur les manières d'ancrer les savoir-faire chez des élèves dont le travail d'apprentissage à la maison n'est pas efficace ou pas suffisant. La mémoire repose sur la répétition, travail qui est déjà fortement initié en classe, mais ne peut totalement s'affranchir d'un travail personnel (ce qui peut rapidement faire de l'espace domestique le creuset des inégalités sociales telles qu'elles s'expriment à l'école).